Vers un modèle de développement axé sur la gouvernance

Le Maroc est un conglomérat de territoires, partant de l'échelon douar/quartier à l'échelon régional, en passant par les niveaux communal et provincial. Ainsi, le Maroc compte 12 régions, 75 provinces, 1538 communes et plus de 40.000 douars et quartiers. Au sein de ces unités territoriales cohabitent des citoyens et citoyennes et interagissent différentes institutions et organismes de nature communautaire, publique, privée et civique, intervenant dans divers secteurs et activités sociétales. Actuellement, il est du commun accord que le modèle actuel de développement, adopté il y a plus de 50 ans, est arrivé à ses limites et ne peut plus répondre aux besoins évolutifs de la société marocaine. Ce modèle est caractérisé par une interventionnisme forte et centralisée de l'État qui, malgré ses effets positifs indéniables sur les infrastructures et la croissance économique, a aussi produit des effets délétères non prévue et non voulus sur le capital social et sur la vie collective en générale. Ainsi, la capacité à créer des ciments sociaux et à mener des initiatives collectives permettant de tenir les individus en réseaux et en agrégats solidaires et fonctionnels s'est érodée. Les limites de ce modèle sont aussi aggravées par l'intrusion d'un style de vie et d'un modèle de croissance non durable imposés par les tendances mercantilistes de la mondialisation et aboutissant ainsi à une dégradation continue des valeurs sociétaux, de la cohésion sociale, de l'économie locale et de l'environnement, etc. Partant de ces constats, la conception d'un nouveau modèle de développement convivial et durable devient une nécessité. Ce nouveau modèle doit avoir comme finalité de co-construire des territoires et des communautés solidaires et fonctionnels en se basant sur la participation proactive des citoyens et la collaboration efficace entre les acteurs publiques, économiques et la société civile. Si la gouvernance peut-être définie comme "la coordination efficace d'un ensemble d'activités au niveau d'un territoire quand l'information, les pouvoirs de décisions et les ressources sont vastement distribués entre plusieurs intervenants ", au Maroc, il y a encore des insuffisances au niveau des conditions cadres et de structures de gouvernance appropriées pour assurer cette fonction essentielle de coordination efficace des initiatives des différents intervenants à tous les échelons territoriaux. Ainsi, le nouveau modèle souhaité doit être axé sur la gouvernance ou l'État joue un rôle déterminant comme catalyseur et facilitateur de la concertation et la collaboration multi-acteurs au niveau des différents échelons territoriaux. Le rôle de l'État consiste ainsi à mettre en place de nouvelles structures de gouvernance dotés des outils et des compétences requises pour stimuler l'intelligence collective et accompagner les acteurs territoriaux dans des processus de changement orientés vers la convivialité et la création et le partage de la richesse. Néanmoins, la transition vers ce nouveau modèle de développement ne pourra pas réussir sans l'ancrage territorial d'un nouveau système (en métaphore, comparable à la fonction du système d'exploitation des ordinateurs-Operating system) qui remplira une fonction vitale qui manque dans l'écosystème de développement de notre pays. Il s’agit de la fonction de catalyseur et facilitateur de la coordination et la collaboration entre les acteurs publiques, privés et civiques intervenant dans les différents champs d'activités sociétaux. Ainsi, ce système porté un nouveau catégorie d’acteur servira à accompagner les acteurs territoriaux à mieux exploiter leur intelligence collective dans un processus de changement orienté vers la création de la richesse et l'amélioration du cadre de vie des citoyens. En termes de fonctionnalité, le Système d'Exploitation Sociétal proposé assurera trois fonctions clés : 1) l'accès à l'information, 2) la coordination efficace, et 3) la rationalisation des ressources. Je recommande vivement le CSMD de s'atteler à la conception d'un tel Système (SES.maroc) qui pourra être la "plateforme de base" ou le "logiciel mère" pour faciliter la co-construction du nouveau modèle de développement une fois conçu. Il est à noter qu'un tel système est actuellement rendu possible grâce aux progrès réalisés dans le domaine des technologies de l'information et aussi dans le domaine des méthode et outils de l'ingénierie de collaboration.